
L’histoire du Bénin est celle d’un peuple fier, d’un royaume puissant, mais aussi d’une longue série de sacrifices face aux forces coloniales et aux bouleversements politiques. Du royaume du Dahomey, célèbre pour sa puissance militaire et son organisation sociale unique, à la République du Bénin indépendante, ce territoire ouest-africain a traversé des siècles d’épreuves, de résistances et de transformations. Cet article retrace ce parcours complexe, entre gloire ancienne et luttes modernes, pour comprendre comment un peuple de souverains a été sacrifié, mais aussi comment il a su renaître.
Le Royaume du Dahomey : un empire de souverains guerriers
Le Dahomey est un ancien royaume fondé au XVIIe siècle par le peuple Fon, qui s’installe dans la région d’Abomey, sur l’actuel territoire du Bénin. Initialement vassal de l’Empire Yoruba d’Oyo, il paie un tribut annuel avant de s’affirmer progressivement comme une puissance autonome.
Sous le règne du roi Agadja (1711-1740), le Dahomey étend son territoire et organise une armée redoutable. Le royaume devient célèbre pour ses guerrières amazones, une unité militaire féminine unique en Afrique, symbole de la puissance et de la discipline du Dahomey.
Le commerce des esclaves est au cœur de l’économie dahoméenne entre 1740 et 1880. Le royaume tire profit des échanges avec les Européens, notamment les Portugais et les Français, qui établissent des comptoirs sur la côte, comme à Ouidah et Cotonou57. Cette période est marquée par une prospérité économique mais aussi par la tragédie de la traite négrière, qui a profondément marqué la région.
La résistance face à la colonisation française
Au XIXe siècle, le Dahomey est l’un des derniers royaumes africains à résister à la colonisation européenne. Le roi Ghézo (règne de 1818 à 1858), issu d’un coup d’État, affranchit le royaume de sa vassalité envers Oyo et consolide son pouvoir5. Son fils Glélé lui succède jusqu’en 1889 et mène des campagnes militaires victorieuses contre les Yoruba, tout en affrontant la pression croissante des Britanniques et des Français qui veulent abolir la traite négrière.
La France obtient en 1878 un accord avec Glélé pour transformer le port de Cotonou en protectorat, mais les tensions persistent. Son successeur, le roi Béhanzin (1889-1894), refuse la domination française et lance des raids contre les protectorats24. La France riposte par deux guerres coloniales (1890-1894), qui se terminent par la défaite et l’exil de Béhanzin. La ville d’Abomey est incendiée, marquant la fin du royaume indépendant25.
La colonie française du Dahomey est alors formée, regroupant l’ancien royaume, Porto-Novo et une vaste zone au nord2. Le dernier roi, Agoli-Agbo, est installé comme souverain fantoche avant d’être exilé. Le pouvoir traditionnel est dissous, mais les descendants royaux restent des leaders d’opinion auprès des Fon.
Du Dahomey à la République du Bénin : un chemin vers l’indépendance
Le Dahomey devient une colonie française jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle. En 1958, il est proclamé république autonome au sein de la Communauté française, puis accède à l’indépendance le 1er août 1960 sous le nom de République du Dahomey168.
Les premières années de l’indépendance sont marquées par une instabilité politique chronique, avec une succession de coups d’État militaires et de crises6. Le pays est surnommé « l’enfant malade de l’Afrique » en raison de cette turbulence. En 1972, le colonel Mathieu Kérékou prend le pouvoir et instaure un régime marxiste-léniniste, rebaptisant le pays République populaire du Bénin en 1975, marquant une rupture avec le passé colonial et monarchique.
Le renouveau démocratique et l’affirmation d’une identité nationale
À la fin des années 1980, le Bénin connaît une grave crise économique et sociale. La conférence nationale de 1990 marque un tournant historique : elle instaure un régime démocratique, adopte une nouvelle constitution et ouvre la voie à des élections libres6.
Depuis, le Bénin a connu une stabilité politique relative, alternant au pouvoir des dirigeants civils élus. Le pays s’affirme comme un modèle démocratique en Afrique de l’Ouest, tout en continuant à valoriser son riche patrimoine culturel et historique.
Un peuple de souverains sacrifiés
L’histoire du Bénin est celle d’un peuple qui a vu ses souverains, ses institutions et sa souveraineté sacrifiés face aux puissances coloniales. Le royaume du Dahomey, avec sa culture, son organisation sociale et sa puissance militaire, a été brisé par la colonisation française. Les rois, symboles de cette souveraineté, ont été exilés ou réduits à des rôles purement cérémoniels.
Cette perte de souveraineté a profondément marqué la mémoire collective et la construction identitaire du Bénin moderne. Pourtant, les descendants des rois restent des figures respectées, incarnant la continuité d’une histoire millénaire.
Une histoire de résilience et de renaissance
Du Dahomey au Bénin, l’histoire est celle d’un peuple qui a traversé la grandeur, la colonisation, la lutte pour l’indépendance et la quête d’une démocratie stable. Malgré les sacrifices imposés par la colonisation et les tumultes politiques, le Bénin a su préserver son identité et construire un avenir fondé sur la liberté et la justice.
Cette histoire invite à reconnaître le courage des ancêtres, la richesse culturelle et la détermination d’un peuple qui, malgré les épreuves, continue d’écrire sa propre destinée.